lundi 8 septembre 2008

Maria Dolores

.Je me suis longtemps (trop longtemps!) demandée comment aborder cette critique. Mon but : donner l'envie de lire ce livre (que j'ai beaucoup aimé) sans trop raconter l'histoire. J'en suis à la troisième version de cette critique et, ayant largement dépassé le délai acceptable, je poste !

La mère des chagrins, Richard McCann

Ce livre rassemble une dizaine de chapitres/textes qui peuvent se lire séparément (ils sont d'ailleurs parus dans différents journaux). La façon dont ces textes sont assemblés reprend le schéma propre aux souvenirs : on raconte une événement, puis on revient sur un point qui, après coup, paraît important pour comprendre, et les souvenirs se chevauchent. Cela donne à ce livre un ton très naturel et très vivant. Il semble que l'auteur nous dise, tiens ! j'avais oublié, mais il s'est aussi passé ça ...

Bref résumé : une famille dans la banlieue proprette de Washington durant la guerre froide (l'image même du bonheur américain vanté dans les réclames de l'époque) : le père, la mère et les 2 garçons, Davis l'aîné et le narrateur.



Les personnages

  • Le père : il essaie d'être le père de ses 2 garçons, mais comment ne pas préférer l'aîné, Davis, qui pêche au narrateur qui découpe des images de papier à habiller et qui est si collé à sa mère,...
  • La mère : accrochée à son enfance/jeunesse dorée, elle pleure sans cesse sur son sort qui lui a fait perdre les belles choses de son enfance. Elle ne semble pas particulièrement aimer être mère, si ce n'est pour avoir un miroir magique lui disant qu'elle est la plus belle, la plus élégante, ... et ce miroir, c'est le narrateur...
  • Le frère aîné, Davis : durant l'enfance, sa mère le rabaisse et ne s'occupe pas de lui, mais il paraît au moins avoir un rapport privilégié avec son père.
  • Le narrateur : il se débat entre l'emprise de sa mère et le reste de la famille avec lequel il voudrait se fondre. Il envie le rapport de son frère avec leur père, à qui il veut faire plaisir et dont il veut se faire aimer, mais ses tentatives échouent...
La mère est toxique pour ses deux enfants (dirait certaine psy que je connais) : elle rabaisse son fils aîné et phagocyte le cadet, qui est SA chose, sa prolongation.

Et cette mère crée une réelle souffrance qui poursuivra les 2 garçons dans l'âge adulte.

Tous les résumés et critiques que j'ai lus sur ce livre insistent sur l'enfance du narrateur.

Moi, ce que je retiens, c'est moins l'enfance proprement dite que son impact sur la vie adulte des deux garçons : le frère paumé qui brûle sa vie d'adulte et l'auteur qui se livre à un combat intérieur incessant, le désarroi des deux garçons. Le narrateur ressent en plus une certaine culpabilité par rapport à son frère, Davis, en raison du rapport, qu'il pense privilégié, que lui-même a eu avec sa mère.

Avec le temps, l'idéalisation s'efface peu à peu et sa mère devient une femme à ses yeux ; il comprend le mal qu'elle leur a fait, et il la voit finalement comme une vieille femme un peu ridicule car toujours cramponnée au souvenir du bonheur de sa jeunesse insouciante.

Bref, c'est un roman émouvant, touchant, qui parle pudiquement de la difficulté à être soi-même pour soi et non pas pour un autre (les autres), de la difficulté à surmonter la charge mise sur nos épaules par nos parents, de la difficulté à ne pas culpabiliser pour tout ce qui se passe autour de soi, du SIDA.

Tout le poids de l'enfance qui se fait sentir au fil des années... que l'on doit secouer de ses épaules pour arriver à être soi...



J'encourage chacun à lire cette Mère des Chagrins.


P.S. Le livre était entouré d'une bande faisant de la pub pour des livres sur l'enfance dans la collection Points. J'ai bien sûr commencé à acheter et lire certains titres. Suite au prochain numéro...
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